Les virus ne sont pas tous mauvais : ils nous permettent de naître !
LES VIRUS, PASSAGERS CLANDESTINS DE NOTRE ADN
Un virus est un parasite qui a besoin d'un foyer d'accueil, une cellule, dont il pourra détourner les machineries pour les obliger à fabriquer de très nombreuses copies de lui même, les virions. La cellule consacre ainsi toute son énergie à produire les molécules virales et à les assembler (programme de 3e). Au final, les virions s'échappent de la cellule qui ne survit pas à une telle expérience !
Comment fait le virus pour berner les systèmes d'alarme qui s'activent normalement dans une cellule en présence d'un intrus ?
En premier lieu, il se débarrasse des enveloppes qui le rendent repérable et libère son patrimoine génétique. Pour échapper définitivement au contrôle de la cellule, il va ensuite se camoufler au cœur de l'ADN de nos cellules en s'insérant parmi nos gènes. Par la suite, lorsque nos gènes s'expriment, les machineries cellulaires qui patrouillent à leur niveau sont incapables de repérer le virus camouflé et le prennent en charge au même titre que les autres gènes. Les gènes du virus s'expriment alors et la ronde infernale est lancée… c'est l'infection.
LE VIRUS PEUT CHANGER DE CACHETTE…
Certains virus ne se manifestent qu'une seule fois dans notre vie, voire jamais. Dans ce cas, le silence du virus signifie qu'il s'est intégré dans une région d'ADN que nous n'utilisons pas. Le virus dont les éléments ne sont plus produits perd alors sa virulence. Cependant, le virus peut est copié et transmis aux cellules filles au même titre que le reste de notre patrimoine génétique. A l'occasion, une copie du virus peut se déplacer par un phénomène complexe appelé familièrement « saut de gènes ». Les fragments issus des sauts répétés du virus sont appelées transposons. Ces sont les cellules sexuelles (ovules et spermatozoïdes) qui tolèrent le mieux ces phénomènes car elles sont capables de réparer les cassures sur l'ADN que génèrent ces déplacements.
LE PATRIMOINE GENETIQUE DES VIRUS SE TRANSMEt
Depuis nos plus lointains ancêtres, à chaque génération, les transposons se multiplient et se déplacent dans le patrimoine de nos cellules de façon aléatoire. Leur nombre et leur position sont uniques chez chacun de nous, excepté les vrais jumeaux. La cartographie des transposons nous identifie de façon aussi fiable que nos empreintes digitales. C'est ce qu'on appelle l'empreinte génétique, utilisée de nos jours par la police scientifique et lors des recherches en filiation.
VIRUS, ACTEURS DE L'ÉVOLUTION
L'expansion extraordinaire des transposons a provoqué une forte augmentation de la taille de notre patrimoine génétique dont ils représenteraient aujourd'hui plus de 90% ! En fait, les mammifères dont nous faisons partie utilisent moins de 5% de leur ADN pour produire leurs protéines.
Il arrive qu'au cours de leurs copier-coller successifs, les transposons embarquent avec eux des morceaux de nos propres gènes pour les réinstaller à distance, parfois au milieu d'un autre gène. Dans ce cas, un gène "hybride" est formé qui donne le plus souvent une protéine anormale, parfois toxique. Pourtant, dans certains cas, ces protéines rendent l'organisme qui en hérite plus performant.
Il est certain que ce phénomène a très largement contribué à l'évolution.
SANS LES VIRUS, NOUS NE SERIONS PAS HUMAINS !
Pour illustrer la contribution des virus à l'évolution, voici un exemple qui nous concerne directement : les mammifères dits euthériens dont nous faisons partie sont caractérisés par une grossesse avec présence d'un placenta, le bébé naissant à un stade de développement très avancé. Le placenta est indispensable à la nutrition du fœtus grâce aux échanges de nutriments et de gaz (oxygène et CO2) entre le sang de la mère et celui du fœtus (programme de 4ème). Or, l'existence du placenta repose sur une protéine essentielle et la perte de cette protéine se traduit par la mort in utero des embryons dès que la circulation fœto-maternelle se met en place. Cette protéine a donc été un facteur déterminant dans l'émergence des mammifères euthériens considérés comme les plus hauts perchés dans l'arbre de l'évolution. Et cette protéine n'est autre qu'une protéine d'origine virale !
A partir de telles observations, on peut admettre que les virus ne sont pas toujours les vecteurs de fléaux dévastateurs que l'on connaît. Ils apparaissent même comme des agents indispensables de l'évolution.